Un joyeux bon anniversaire, chere Mêre

Esternay House, résidence Londonienne des Comptes de Meysfield, 4 novembre 1815

L'orchestre jouait doucement dans la grande salle de bal d'Esternay House. L'assemblée n'était pas aussi dense que lors des événements mondains. C'était une soirée privée, réservée à la famille. À peine une soixantaine d'invités. Tous étaient là pour fêter le quarante-cinquième anniversaire d'Élisabeth Field, comtesse de Meysfield.

Oswald avait donc joué la comédie du fils aimant devant la cour de sa mère. Ne vous méprenez pas. Oswald aimait sa mère, ce n'était pas le problème. Mais il n'aimait pas les grandes effusions de sentiments qu'exigeait sa mère lors de ce genre de circonstances. De manière générale, il n'aimait pas manifester ses sentiments. Il se sentait alors vulnérable. Comme si alors chacun pouvait voir son secret.

Mais bon. Ça faisait plaisir à Mère...

Lassé de toutes ces simagrées, il s'éloigna un peu de la foule et s'assit sur une des chaises installées pour les danseurs fatigués. À côté de lui, une jeune femme qu'il reconnut bien vite. Eleanor était une cousine du côté de Mère. Feu la mère de la jeune fille, Lily, était une cousine germaine d'Élisabeth Field et malgré le mariage de son père, elle et sa famille étaient invitées à toutes les fêtes de famille.

"Bonjour Cousine, comment allez-vous?"

Un bon, joyeux anniversaire chère mère

◦ With. @Oswald Field ◦

Esternay House, résidence londonienne des Comtes de Meysfield, 4 novembre 1815

Eleanor n'avait jamais vraiment apprécié toutes ces soirées mondaines, où elle devait toujours bien se tenir. Devoir constamment suivre l’étiquette, c’était épuisant. Surtout lorsqu'on était une femme — à marier qui plus est. Les femmes devaient se tenir correctement, ne pas énoncer leur opinion en public, ne pas montrer un centimètre de peau là où il ne fallait pas… c’était bien pour ça que la brune admirait son amie Ambrosia. Elle, elle arrivait à ne pas respecter l’étiquette, les convenir et les mœurs, sans avoir de remords.

Aujourd’hui, c’était l’anniversaire de la cousine de sa défunte mère, Lily. 'Anor avait toujours apprécié la famille du côté de sa mère. Ils étaient gentils, surtout avec son cousin Oswald. Ces deux là s’entendaient particulièrement bien. La jeune femme avait passé la soirée dans un de leur canapé confortable, n’ayant pas particulièrement envie de devoir aller parler en respectant l’opinion de son père.

En voyant son cousin venir s’asseoir à côté d’elle, Eleanor se retourna vers lui en souriant.

— Bonjour cher cousin. Je vais bien et vous ?

L'orchestre entama une valse adorée de sa mère et celle-ci fut poussée, hilare sur la piste par son mari. Oswald les savait amis, tous les deux, mais rien de plus. Ils n'étaient plus amants depuis des années et vivaient chacun leur vie en bonne entente. Mais leur amitié était forte. Les années à vivre ensemble les avaient rapprochés et on pouvait parfois les voir, ainsi, complices.

C'était beau à voir. Oswald espérait que son mariage serait aussi réussi que celui de ses parents. Il pensa à Aelis. La belle Aelis. Il la priverait sans doute de quelques années de liberté, mais quand ils auraient eu un fils, elle pourrait vivre sa vie. Il accueillerait même avec plaisir les fruits de ses amours dans leur famille, si elle voulait. Il faudrait qu'il n'oublie pas de le lui dire.

Il rejoint sa cousine. Elle avait à peu près l'âge d'Aelis. Elle entrait dans le monde cette année.

"Je vais bien... Comment se prépare votre entrée dans le Monde? Vous avez hâte? Votre belle-mère a dû déjà vous proposer une liste de prétendants. Mère m'en fournit une liste actualisée chaque année..."

Un bon, joyeux anniversaire chère mère

◦ With. @Oswald Field ◦

Esternay House, résidence londonienne des Comtes de Meysfield, 4 novembre 1815

Eleanor n’avait jamais vraiment apprécié la danse non plus. Enfin, pas en public. Elle avait trop peur de faire un faux pas et d’entacher sa réputation. La brune avait deux pieds gauches lorsqu'il s’agissait de danser. C'est bien pour cela qu’elle préférait s'abstenir de danser lorsqu’elle le pouvait.

Son entrée dans le monde l’angoissais un peu. Premièrement, parce qu’elle savait qu’elle ne pourrait jamais être avec l’élu de son cœur, dont elle ne connaissait même pas le nom d’ailleurs. Tout simplement parce qu’il était un chapelier, et que le père d'Eleanor possédait un titre. Ce serait la honte pour les Johnson que leur fille aînée ne se marie avec un roturier. Et sinon, elle espérait être une amie de son futur mari.

- Je dirais que ça va bien, enfin pour le moment. Et oui, elle m'en a donné une, mais actuellement c’est le dernier de mes soucis. J'ai rencontré un homme, mais entre nous deux c’est impossible, et c'est bien cela le problème…

"Ah... Les mères et les listes..."

Quand un enfant approchait l'âge du mariage, dans la noblesse, sa mère devenait des plus insistantes. Alors certes, un homme avait plus de possibilités de lui échapper, mais la pression n'était pas moins forte. Sa mère avait essayé de faire pression sur lui en passant par ses amis. Ses amis étaient tous mariés, ne voulait-il pas fonder sa famille? Avoir un héritier?

Alors déjà, non. Wolf n'était pas marié. Ou en tous cas ils n'en avaient pas reçu le faire part.

Ensuite, Fox s'était peut être marié, mais cela ne lui avait guère porté bonheur.

Et pour finir, si Swan était marié et père de famille, il n'avait pas encore d'héritier, que des héritières.

Au total, le petit groupe n'était pas vraiment un exemple de bonheur conjugal...

"C'est impossible? Pourquoi donc, ma chère? Quel est le problème? Vous savez que vous pouvez me parler...?"

Un bon, joyeux anniversaire chère mère

◦ With. @Oswald Field ◦

Esternay House, résidence londonienne des Comtes de Meysfield, 4 novembre 1815

Eleanor eut simplement un léger rire. En fait, elle savait que c’était probablement son père qui avait demandé à Mary-Ann de lui faire une liste de prétendants. Mary-Ann, elle, lui aurait laissé épouser qui elle voulait, même ce chapelier qu’elle aimait tant.

Alors, techniquement, ce n’était pas Mary-Ann qui était insistante. En fait, c’était son père qui l’était au travers de son épouse.

Elle eut ensuite un léger soupir, et regarda autour d’elle pour être sûr que son père n’était pas dans les parages.

— Voilà. L’autre jour, nous sommes allés m’acheter un nouveau chapeau pour un bal. Et je suis tombée amoureuse du chapelier. Et je crois qu'il m’apprécie également. Mais le truc, c’est qu'on peut pas se marier…

Le... chapelier?

Ah bah tu m’étonne que cette union soit impossible. Jamais le Baron ne marierait sa fille à un... artisan?

Euh. Que faire. Que faire face aux grands yeux innocents d'Eleanor braqués sur lui?

"Mais, euh... tu le connais, ce chapelier? Il a un nom?"

Le vicomte ne voulait pas vexer sa cousine, mais c'était compliqué. Devait il jouer les grands frères et lui interdire ce mariage? Non, ce n'était pas son rôle.

"Tu sais, ce n'est pas pour te rendre malheureuse que tes parents veulent te marier à un bon parti. C'est pour que tu garde ton train de vie. Tes robes. Tes Bals. Tes... Chapeaux?"

Un bon, joyeux anniversaire chère mère

◦ With. @Oswald Field ◦

Esternay House, résidence londonienne des Comtes de Meysfield, 4 novembre 1815

Bah oui. De tous les hommes dont la brune aurait pu tomber amoureuse, c’était le chapelier que son cœur avait choisi d'aimer. Si seulement on pouvait choisir de qui on tombe amoureux, ça aurait grandement simplifié la vie d'Eleanor.

Tandis qu’elle eut cette réflexion, elle regardait son cousin, attendant une réponse de sa part. Ce sujet était sérieux et très important pour elle. La jeune fille espérait qu'il la supporterait dans cet amour impossible.

— Oui, je le connais. On s'est vu plusieurs fois en cachette. Enfin, pas totalement en cachette.

Elle eut un léger soupir.

— Je le sais bien, mais… qu’est-ce qui vaut mieux ? Avoir un train de vie simple et être heureuse avec l’homme que j’aime, ou bien avoir un train de vie de la noblesse et être malheureuse avec un homme que je n'aime pas ?

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