Le Mardi 8 Février 1816
Oswald s'entrainait tranquillement au billard anglais quand on toqua à la porte.
"J'avais demandé la paix!""C'est important, Monsieur."Le Vicomte soupira violemment, posa sa queue de billard sur son pied et marmonna un
"Entrez" agacé. Apparut alors le majordome de la maison, l'air sombre.
"Milord, un Officiel est là. Il dit que c'est important. Que ça concerne Monsieur le Comte.""Eh bien, allez chercher mon père au lieu de m'importuner.""Non, Milord. Vous ne m'avez pas compris. Ça concerne votre père."L'air misérable du vieux domestique et son hochement de tête provoquèrent une pâleur de marbre chez le Vicomte.
"Pardon?! Il y a eu un problème?""Il n'a rien voulu me dire de plus."Oswald posa violemment la queue sur la bale de billard, au risque de déchirer le velours, mais il n'en avait cure. Il se précipitait déjà vers l'entrée de la demeure, poursuivi par le majordome.
"Je l'ai installé dans la Bibliothèque, Milord! Les Dames occupent le petit salon!"Oswald ne perdit pas une seconde et franchit le seuil de l'antre du savoir. Sans perdre plus de temps, il s'adressa au messager:
"Que se passe-t-il? Où est mon père? Où a-t-il été transporté?""Eh bien, Milord...""Eh bien quoi? Parlez sans détour!""Il a été mené à la morgue...""À la..."Pris d'un coup de sang, le Vicomte saisit le messager par le col et le colla contre la bibliothèque.
"Vous mentez! Où est-il?""Je suis désolé, Milord..."Le messager lui tendit ce qu'il avait en main. Une enveloppe. Oswald lâcha l'homme et s'en empara. À l'intérieur une bague. La chevalière de Père, qu'il ne quittait jamais. Et un document. Les mains tremblantes, le jeune homme ouvrit le feuillet plié en deux.
"NON. NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON!"Incapable même de reculer jusqu'au plus proche fauteuil, Oswald tomba au sol, incapable de garder la station debout. Hébété, il parcourut le certificat qui lui apprenait que son père adoré avait succombé à une plaie à la gorge.
"M...M...Mais... Je... On l'a...?""Assassiné, oui, Milord. La justice a ordonné une enquête. Le corps vous sera rendu à l'issue de l'examen par la faculté, Monsieur le Comte."Le... Comte?
Oh, bon Dieu, il était Comte. Le Comte est mort, vive le Comte. Oh, bon Dieu, il aurait voulu ne jamais recevoir ce titre.
Maman. Sam. Il devait les prévenir. Maladroitement, presque comme un enfant perdu, il se releva. Le Cœur battant, avec l'impression de se détacher de son corps, il s'entendit s'excuser auprès du messager et lui proposer d'aller se restaurer aux cuisines. Puis il épousseta son pantalon, enfila la chevalière de son père et se vit marcher vers le petit salon.
Quand il entra, il semblait normal, à l'exception de son teint pâle. D'un regard, il s'assura qu'elles étaient toutes deux assises.
"Mère. Samantha. On m'a porté une bien terrible nouvelle. Je... Oh Mon Dieu, je..."Incapable de le cacher, son corps le trahit et laissa échapper un sanglot. Puis il se sentit de nouveau loin de lui-même et put continuer.
"On vient de me rapporter... La... Mort de Père..."Sa voix s'était de nouveau brisée sur les derniers mots. Il était incapable de regarder les deux femmes de sa vie dans les yeux.