The Masquerade • Augustus & Lucy

Un rendez-vous galant. C’était ce à quoi les choses ressemblaient, d’un point de vue extérieur et c’était bien mieux ainsi, bien que la simple idée d’être épiée par les commères ne faisait qu’agacer plus encore la demoiselle aux mèches cuivrées. Vêtue, pour l’occasion, d’une robe bleu marine, elle évoluait dans le parc, suivie par sa femme de chambre. Un chapeau à plume de faisan venait orner son chignon méticuleusement rassemblé sur sa nuque. Evidemment, les passants la saluaient, parfois même trop bas pour qu’elle ne trouve cela normal. Duchesse d’Argyll. Elle s’efforçait de répondre de ce titre bien qu’elle l’avait en horreur, bien qu’elle se haïssait à chaque fois qu’elle se devait de le porter. L’idée même qu’elle puisse jouir d’un tel rang en raison de la mort de l’entièreté, ou presque, de sa famille lui filait la gerbe.

Rejoignant le grand saule sous lequel ils s’étaient donnés rendez-vous, elle observa les alentours, guettant la venue du jeune Augustus Cavendish. Le futur duc du Devonshire avait en effet su la convaincre de ce rendez-vous, par lettre interposées, une aubaine pour le duc de Silésie, le tuteur de la demoiselle, qui voyait en ce parti un nom respectable et un jeune homme honorable. Pour autant, les deux jeunes gens, eux, savaient que tout n’était qu’apparences. S’étant d’abord entretenus pendant la saison printanière, Augustus lui avait confessé le désir de son père de le voir la courtiser. Une entreprise fort méprisable face à laquelle la renarde avait montré les crocs. Pour autant, à force de discussions, elle avait fini par comprendre qu’il ne lui voulait le moindre mal et qu’il pouvait représenter un avantage pour elle. Ne lui avait-on pas dit qu’accorder plus de faveurs qu’il n’en fallait à un homme pouvait dissuader les pires serpents ? Alors, elle s’était, sans gaieté de cœur, prise à ce jeu. Echangeant des billets tenus secrets, ils prévoyaient le déroulement de leurs rencontres avant l’heure, mettant en scène une cour digne de ce nom alors qu’ils ne faisaient qu’échanger des banalités d’usage durant des heures, apprenant certes à se connaître mais pas pour espérer se lier d’un mariage à l’avenir.

Tournant un instant ses yeux clairs vers les feuillages tombant de l’arbre, elle se déconnecta de cette réalité, songeuse et pensive, prête à être agréablement surprise par la venue du jeune homme.

Augustus adorait son père et sa mère, mais là il devait bien avouer que ses géniteurs se montraient assez agaçants. Il ne voulait absolument pas se marier, du moins jusqu’à ce que la femme de ses rêves finisse par accepter de l’épouser. Il ne pourrait jamais cesser de l'aimer, et ça, il le savait. Mais le duc et la duchesse du Devonshire ne semblaient pas comprendre cela et l’obligeait quasiment à faire la cour à une jeune fille.

Comme il savait que lui et mademoiselle Lucy Campbell seraient un excellent parti. Or, les deux jeunes gens ne voulaient pas se marier, et ne se marieraient jamais véritablement entre eux. Seulement, cela semblait la solution idéale pour Augustus afin de satisfaire ses parents.

C'est comme cela qu'il avait organisé de A à Z, avec l’aide de la demoiselle, un faux rendez-vous galant. Tout son déroulement était organisé à la seconde près.

Il arriva alors dans le parc, rejoignant mademoiselle Lucy à l’arbre où elle l’attendait.

- Bonjour mademoiselle Lucy. Il fait un temps merveilleux, ne pensez vous pas ? 

@Lucy Campbell